Les tontons mangeurs

Les tontons mangeurs

brunch vs. repas de mamie

Je suis parisien depuis quelques années maintenant, et je me suis rendu compte récemment d’un phénomène très intéressant. En effet, lorsque je suis amené à discuter avec mes amis, la conversation nous conduit inévitablement vers une question cruciale : qu’est-ce que tu fais ce dimanche ? La réponse est catégorique : je brunch !!!

Et voilà, après avoir entendu cette phrase des centaines de fois, elle  « commence à mes les briser menu » comme dirait Lino. Paris brunch !!! La capitale du repas gastronomique  récemment inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco brunch le dimanche !! Hérésie !! Complot !!
Tout le monde en parle ! Les magazines, les blogs, les chefs s’y mettent, tous les hôtels, les palaces, les restaurants et même les bistrots parisiens également. 

Et bien moi, je n’en peux plus des brunchs, je n’en veux plus !

J’en ai marre de bouffer des œufs brouillés avec du bacon, de la confiture sur des muffins, du muesli dans mon yogourt bio le dimanche matin. Je ne suis ni anglais, ni new-yorkais, moi je suis français, et là d’où je viens, le dimanche midi c’est le « repas de mamie » !!

Car oui, mon brunch à moi, c’est le vrai repas de famille du dimanche midi. C’est le gigot d’agneau, le rôti de porc avec les pommes de terre et les haricots verts. C’est le bœuf bourguignon, les saucisses aux lentilles, le tout arrosé de Mâcon. J’aime ces repas préparés dès l’aurore et qui n’en finissent pas. Ces successions de plats qui vous font sauter le bouton. Cette cuisine simple qui demande patience et passion. J’aime ces souvenirs quand petits, nous nous faufilions dans la cuisine pour piquer dans les plats où tremper nos doigts dans la pâte à gâteau encore crue, sous le regard à la fois furieux et attendri de nos grands-mères.

Mais alors pourquoi Paris brunch-t-il aujourd’hui, alors qu’il n’y a jamais eu autant de mamies en France ?

Pour répondre à cette problématique à la fois culinaire et sociale, j’ai essayé de comprendre ce qui poussait mes amis à bruncher.
Le premier élément de réponse est que la plupart d’entre eux sont de province et n’ont pas de famille sur Paris, donc aucun impératif dominical. Deuxième élément de réponse, peu de mes amis savent vraiment cuisiner, et même s’ils le souhaitaient, ils vivent tous dans des appartements où l’on peut se faire cuire des pâtes sans bouger de son lit. Et enfin, le dernier argument est basé sur le fait que nous avons connu cette tradition anglo-saxonne qu’est le brunch lors de nos différents séjours à l’étranger, notamment durant nos études. Celui-ci nous est donc plus ou moins familier aujourd’hui.

En résumé, le parisien bruncherait car il serait seul sans famille (un peu comme Rémi en fait), sans connaissances culinaires, sans place pour cuisiner de toute façon et nostalgique de ses brunchs Erasmus. Ouep, disons que c’est un début de réponse. En gros, le brunch, c’est un peu comme le repas de mamie, en plus simple et plus rapide pour les Parisiens angoissés. 

Pour dire la vérité, je ne déteste pas les brunchs. J’aime bruncher en réalité. J’aime bruncher à Londres, New York ou Montréal. Comme j’aime grignoter la tortilla à Barcelone, manger une currywurst à Berlin, des köttbullar à Stockholm. Mais ici, j’aime manger « un plat de mamie » le dimanche, avec mes amis, ceux que j’aime, car ici, ils sont ma famille.

Alors je lance un appel à tous les bistrots parisiens, les hôtels, les troquets, les brasseries, tous ceux qui font ce métier pour mettre un sourire sur les lèvres des gourmands, et ceux qui veulent mettre notre cuisine, celle de nos mères et de nos grands-mères à leur vraie place : sur la table !! Pensez à nous, jeunes parisiens solitaires, et remplacez vos brunchs par les recettes de vos grands-mères. Resserrez les tables, et invitez cette génération de parisiens esseulés à se réunir et à partager leurs sourires autour d’un vrai repas de mamie !

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